Cela fait quelques années que le monde de l’art fait les yeux doux aux collectionneurs asiatiques. Les maisons d’enchères n’hésitent plus à proposer des lots d’exception durant leurs ventes dans la région. La preuve avec “Spider IV”, une araignée monumentale de Louise Bourgeois prochainement mise aux enchères à Hongkong.
Une araignée de bronze monumentale, perchée sur ses pattes de plus 2 mètres de haut. Voici le lot phare de la prochaine vente du soir dédiée à l’art contemporain que Sotheby’s organisera, le 27 avril, à Hongkong. Cette sculpture a été conçue en 1996 par Louise Bourgeois. Elle fait partie d’une série de six autres spécimens dans laquelle l’artiste française, décédée en 2010, joue avec la symbolique de l’araignée.
Si cet arachnide peut être menaçant pour certains, il a toujours été une figure positive dans l’œuvre de la sculptrice. Elle la décrivait comme une “ode à [sa] mère”, qui était responsable d’un atelier de restauration de tapisseries. “Comme les araignées, ma mère était délibérée, intelligente, patiente, apaisante, raisonnable, délicate, subtile, indispensable, soignée et utile”, a-t-elle un jour déclaré.
“Spider IV” est estimée entre 120 et 150 millions de dollars hongkongais, soit 15 et 20 millions de dollars. Elle pourrait ainsi devenir la sculpture la plus chère jamais vendue aux enchères en Asie. Toutefois, il y a peu de chance qu’elle reproduise l’exploit de “Warrior” de Jean-Michel Basquiat à Christie’s Hongkong. L’année dernière, cette toile semi-autobiographie du peintre new-yorkais a été adjugée à 323,6 millions de dollars hongkongais (41,8 millions de dollars), établissant un nouveau record pour un artiste occidental sur le marché asiatique.
Les yeux tournés vers l’Asie
Les enchères pourraient grimper au vu de l’intérêt que manifestent les collectionneurs pour les créations de Louise Bourgeois. L’une d’entre elles, intitulée “Spider”, a été vendue pour 28 millions de dollars chez Christie’s New York en 2015. Un montant qui avait établi un nouveau record de vente pour l’artiste française. Les acheteurs asiatiques ne sont pas, eux non plus, épargnés par la “Louise Bourgeois mania”. Sa sculpture “Quarantina” a été adjugée à 67 millions de dollars hongkongais (8,6 millions de dollars) en 2018, lors d’une vente aux enchères organisée à Séoul.
Selon Alex Branczik, responsable de l’art moderne et contemporain chez Sotheby’s Asie, le fait que “Spider IV” passe sous le marteau à Hongkong confirme l’engouement grandissant des acheteurs asiatiques pour l’art occidental. “La décision de proposer cette sculpture à Hongkong a été mûrement réfléchie”, a-t-il déclaré à Artnet News. “En tant que centre de vente, Hongkong est devenu une région essentielle pour notre activité. Depuis que nous avons commencé à proposer de l’art occidental dans la région en 2017, nous constatons un appétit toujours plus grand pour cette catégorie à travers le continent non seulement pour les œuvres des artistes occidentaux les plus renommés à travers l’histoire mais, en particulier, pour toutes leurs meilleures œuvres”.
Il faut dire que les acheteurs d’art asiatiques font régulièrement chauffer les prix. Ils ont enchéri ou acheté 46% des lots, vendus plus de 5 millions de dollars chez Sotheby’s en 2021. La maison de Patrick Drahi n’est pas la seule à avoir constaté ce phénomène. Les collectionneurs originaires d’Asie ont également été à l’origine de 31% des ventes de Christie’s l’année dernière. C’est pourquoi cette dernière a annoncé son intention d’emménager, en 2024, dans un nouveau siège de quatre étages à Hongkong. Sa rivale, Phillips, quittera, à l’automne, l’hôtel Marriott pour la WKCDA Tower et ses 4400 m2 d’espaces d’exposition et de salles de vente répartis sur six niveaux. L’idéal pour continuer de pénétrer le marché asiatique.