Par Cadfael
Les citoyens d’Europe sont les otages d’une guerre utilisant l’arme énergétique : gaz, pétrole, sabotages, tout devient enjeu. Le spectre d’un potentiel black-out énergétique est recouvert d’un saint silence par les responsables politiques surtout en cette période préhivernale.
La sobriété énergétique
La France se veut rassurante, comme ses voisins d’ailleurs. N’alertons pas inutilement des citoyens qui par ailleurs sont déjà plus que méfiants vis-à-vis de leurs dirigeants. Le 20 décembre 1973, Georges Pompidou disait dans une allocution télévisée « Économisons l’essence, économisons l’électricité, économisons le chauffage ». Viendra ensuite le fameux « Nous n’avons pas de pétrole, mais nous avons des idées » de Valery Giscard d’Estaing en 1976 qui pour remédier au choc pétrolier imposait l’idée d’un changement d’heure devant permettre de se coucher plus tôt pour bénéficier d’une heure de soleil en plus. Ce sera ensuite la chasse au gaspi, une réduction des températures dans les bâtiments publics, les enseignes de magasin éteintes à 22 heures, des limitations des vitesses sur les routes et l’arrêt des émissions télévisées à 23 heures. Et in fine un déploiement de l’énergie atomique qui rend aujourd’hui la France moins vulnérable, mais pas immune.
On parle de sobriété énergétique, jolie phrase qui masque la réalité d’un risque de black-out partiel ou total. En France, le black-out est défini par une perte de contrôle total du réseau. Pour ce faire, selon les experts français, deux risques majeurs doivent survenir. Il faudrait pour cela “un hiver froid et que nos centrales nucléaires ne repartent pas, ou en tout cas pas en assez grand nombre”, expliquait l’ancienne présidente de l’Agence de la Transition écologique française.
Sur 56 réacteurs nucléaires que compte la France, 31 étaient arrêtés le 1er septembre dernier, 16 pour maintenance courante, 14 pour contrôles relatifs à des problèmes de corrosion sur des systèmes de sécurité découverts en 2021et deux pour économie de combustible. EDF a informé que 17 réacteurs étaient inactifs l’hiver dernier sans que cela pose problème. EDF se serait engagée à démarrer tous ses réacteurs cet hiver, malgré certains chantiers de contrôles et de maintenance particulièrement complexes.
France- Allemagne, pile ou face
Le risque numéro deux sont les importations d’électricité de la RFA vers la France. Elles sont, selon un expert, menacées si Berlin n’a « pas suffisamment de gaz pour approvisionner sa propre industrie”. La France, exportateur net d’électricité, a eu un recours urgent à ces importations au début de l’hiver 2021 du fait de sa forte demande interne de chauffage électrique. “S’il y a des problèmes sur les importations, il faudra alors mettre en œuvre d’autres dispositions exceptionnelles, dont la baisse de tension d’environ 5% sur le réseau », avancent les responsables. “Si les stocks de gaz sont normalement remplis – et cela se présente bien -, il faut savoir que les températures de déclenchement, celles qui amènent le système électrique […] à des risques, sont quand même de -4°C degrés pendant plusieurs jours » selon un des patrons d’EDF durant une audition récente devant le Sénat français. « La consommation ponctuelle, instantanée, va être telle que nous pourrions potentiellement ne pas avoir la capacité de fournir tout le monde”, annonce un consultant français. Cela provoquerait alors”des délestages tournants, jusqu’à 2 heures de coupure chez les consommateurs particuliers ».
Et outre-Rhin
L’Agence fédérale allemande de gestion des réseaux ne peut pas exclure un black-out total, mais « un black-out de grande dimension et de longue durée demeure actuellement invraisemblable. » Et de citer des grands froids comme en 2012 ou une demande accrue d’électricité de la part du voisin français avait provoqué une situation extrêmement tendue. De plus actuellement la situation dans les centrales atomiques françaises poserait problème selon le journal du 5 octobre de ZDF, une chaine publique allemande ce qui alourdirait la situation de l’approvisionnement en Europe. La France reçoit de l’électricité allemande avec en contrepartie des livraisons du gaz. Les verts, membres de la coalition au pouvoir à Berlin, trainent encore des pieds pour relancer leurs centrales nucléaires vouées aux démantèlements selon la doxa écologique au pouvoir.
L’électro mobilité pose problème
Très récemment, le ministère de l’environnement allemand constatait dans un pays où l’équipement en bornes est trop lent que le fait de recharger les batteries de son moyen de transport électrique le soir après le travail constituait un énorme problème dû à la surcharge ponctuelle des réseaux. Selon un numéro du magazine online édité par les fournisseurs d’énergie électrique bavarois « Bayernwerk », les « stations de recharge de 200kW réservées aux modèles haut de gamme de Porsche, Audi et BMW, gros consommateurs de puissance électrique, coutent en moyenne 100.000 euros l’unité. ». Le magazine constatait également en juin 2021 que malgré la production problématique des batteries le bilan environnemental d’un engin électrique devenait positif au bout d’une utilisation en moyenne 8.5 années, sans donner plus de détails.
Et de préciser que « le spectre d’un black-out dû à l’électromobilité pourrait devenir réalité du moins de manière ponctuelle et locale ». À cette situation il faut rajouter la surconsommation des 650.000 chaufferettes électriques à air chaud qui se sont vendues en Allemagne ces derniers mois en prévision des hausses de prix des matières premières énergétiques comme le gaz ou le pétrole. Le messianisme environnemental a un prix, spécifiquement en ces temps de crise énergétique lourde. Il serait une responsabilité européenne de faire en sorte que les ménages les moins favorisés ne soient pas encore plus pénalisés par cette situation qui risque de sérieusement déraper du fait du contexte international.