A partir du 5 avril prochain, l’Institut français de Milan accueille l’exposition No Taste For Bad Tase. Celle-ci a été pensée par le VIA (Valorisation de l’Innovation dans l’Ameublement), une association qui a pour vocation de valoriser et de promouvoir la création contemporaine dans le secteur de l’ameublement, à l’occasion de son 40e anniversaire.
Au programme, un portrait du design français à travers une quarantaine de pièces, réparties à travers dix axes et valeurs qui incarnent au mieux le savoir-faire à la française. Le tout organisé par l’un des plus iconiques créateurs français Jean-Charles de Castelbajac, qui s’est fait scénographe pour l’occasion.
Pensez-vous avoir été influencé par le style français?
Jean-Charles de Castelbajac: Depuis ma tendre enfance, je suis marqué par ce que j’appelle le style français. Enfant, chez mes parents, j’étais entouré de meubles d’époque. On me disait “c’est du Louis XVI, c’est du Napoléon III”. Et c’est ce style qui a marqué mon travail. Quand j’ai commencé à faire de la mode, j’ai fait un geste manifeste sur les fauteuils médaillons Jacob de mes parents : j’ai désossé le médaillon pour enlever le tissu rose fané, substitué par un tissu camouflage. C’est là où est apparu ce que j’ai ressenti comme la beauté française, la beauté du trouble , la beauté de l’accident. Cette chose qui n’appartient pas à un esthétisme forcené, à une perfection, mais qui appartient au questionnement.
Comment avez-vous pensé la scénographie de l’exposition?
Jean-Charles de Castelbajac: Quand j’ai été sollicité par mes amis du VIA pour penser cette scénographie autour de 40 designers et industriels remarquables, je me suis dit que je devais parler d’histoire. J’ai appris plus de l’histoire que de mes expériences personnelles. Dans l’histoire du style français, il y a du nomadisme, l’élégance du nomadisme. Celle de Stevenson se promenant dans la forêt de Fontainebleau ou encore Napoléon durant ses campagnes. Je me suis pris à rêver de dix symboles, comme les dix valeurs françaises. J’ai pris le bleu, la couleur de France et le rouge, celle de l’audace, de la sensualité, de la témérité, et de la féminité.
L’exposition va faire sa première halte en Italie. Qu’est-ce qui différencie le design italien du français?
La France, c’est l’esprit, l’Italie la fantaisie et l’humour. Aucune maison d’édition française n’éditerait le canapé en forme de bouche de Salvador Dali.
Quelle est votre pièce préférée du parcours?
Parmi celles que je préfère, il y a le fauteuil Ora-Gami d’Ora Ito.
Que pensez-vous de la place des femmes designer?
J’apprécie beaucoup le travail de Matalie Crasset ou encore celui de Ionna Vautrin. J’admire beaucoup les femmes, deux d’entre elles ont été mes mentors : ma mère et Andrée Putman.
Vous êtes à la fois designer de mobilier et designer mode. S’agit-il de deux disciplines radicalement différentes ou poreuses?
Tout est imbriqué. Aujourd’hui, un grand chef peut recevoir ses clients dans un intérieur meublé par les frères Bouroullec avec des serveurs habillés en Yohji Yamamoto.
Vous multipliez les collaborations avec des marques textiles. Quelles seraient les maisons d’édition avec lesquelles vous souhaiteriez travailler?
Avec Vitra, par exemple, mais aussi avec nombre d’artisans français au savoir-faire particulier qui sont de moins en moins nombreux.