La rentrée littéraire d’automne qui débute cette semaine ne compte que 65 premiers romans (sur un total de 511 titres) mais c’est en osant piocher parmi les oeuvres des primo-romanciers que les lecteurs auront les plus belles surprises.

Parmi les titres à retenir, on peut citer “Bénie soit Sixtine” (Julliard), premier roman de Maylis Adhémar qui raconte l’émancipation d’une jeune femme pieuse sous l’emprise des milieux traditionalistes.

Ce roman (le premier publié sous l’égide de Vanessa Springora, nouvelle patronne des éditions Julliard) est lumineux.

Parmi les autres premiers romans remarquables, on retiendra “La cuillère” (Liana Levi) de la franco-britannique Dany Héricourt, un “road-trip” à la fois drôle et émouvant entre le Pays de Galles et la Bourgogne et “Des kilomètres à la ronde” (Seuil) de Vinca van Eecke, beau récit mélancolique sur la jeunesse et les amours enfuis de ces étés qu’on croyait invincibles.

“Ce qu’il faut de nuit” (La manufacture de livres) de Laurent Petitmangin est un premier roman sensible et puissant sur l’amour filial, l’engagement politique qui peut conduire au pire, les ratés du fameux “ascenseur social” dans la France périphérique. Le livre, pudique et âpre, est déjà en cours de traduction en anglais, allemand, italien et néerlandais.

Toujours parmi les premiers romans, on peut également signaler “Cinq dans tes yeux” (L’Iconoclaste) d’Hadrien Bels, livre amer et décapant sur la gentrification du quartier du Panier à Marseille, “La petite dernière” (Noir sur Blanc) de Fatima Daas récit vibrant d’une jeune musulmane de banlieue, lesbienne, qui ne veut renoncer à aucune identité ou encore “Un jour ce sera vide” (Christian Bourgois) de Hugo Lindenberg, grand roman sur les blessures de l’enfance.

“Valeurs sûres”

Mais la rentrée ne se limite évidemment pas aux premiers romans et les lecteurs peuvent se tourner vers les “valeurs sûres” mises en avant par les éditeurs.

On sort bouleversé de la lecture de “Saturne” (Seuil) de Sarah Chiche (lauréate du prix de La Closerie des Lilas en 2019), vibrant récit d’un amour posthume d’une fille à son père disparu alors qu’elle n’était encore qu’un bébé. Le livre, dédié “aux endeuillés” (il pourrait l’être aux inconsolables), est d’une beauté à couper le souffle.

Autre grand roman à ne pas manquer, “Chavirer” (Actes Sud) de Lola Lafon, est un récit terriblement bien construit sur la pédocriminalité. On suit sur une trentaine d’années le destin d’une adolescente rêvant de devenir danseuse. Victime de pédocriminels, Cléo l’héroïne va elle-même devenir recruteuse de jeunes filles pour ce réseau pédophile. Il est question de culpabilité et de pardon, de vies brisées et c’est magistral.

Serge Joncour (lauréat du prix des Deux Magots, de l’Interallié, du Landerneau…) offre avec “Nature humaine” (Flammarion) un grand et magnifique récit empathique sur le monde rural des années 1960 jusqu’au premier jour de l’an 2000.

Franck Bouysse a le don de transporter ses lecteurs dans des pays étranges à des époques indéfinissables. C’est encore le cas avec “Buveurs de vent” (Albin Michel), un récit épique, ode à l’insoumission, porté par une langue splendide.

Miguel Bonnefoy revient quant à lui avec “Héritage” (Rivages) récit picaresque mettant en scène plusieurs générations d’une famille originaire du Jura établie au Chili au début du XXe siècle.

Très attendue après le succès de son premier roman “Désorientale”, Négar Djavadi offre à ses lecteurs un deuxième roman foisonnant et palpitant. “Arène” (Liana Levi) raconte l’inéluctable embrasement de l’est parisien à la suite de la mort d’un jeune garçon. Il y a ni héros, ni fripouilles dans ce roman, simplement des victimes d’un engrenage qui fait froid dans le dos.

Pas de rentrée sans Nothomb

On a aimé aussi le deuxième roman de Jean-René Van Der Plaesten, “Le métier de mourir” (Grasset) beau roman sur la guerre au Liban vue à travers le personnage d’un officier à la retraite de Tsahal et le superbe roman féministe “Fille” (Gallimard) de Camille Laurens, la nouvelle juré de l’académie Goncourt. Il est également question d’émancipation féminine avec “Les évasions particulières” (Albin Michel) de Véronique Olmi.

Enfin, on ne saurait imaginer une rentrée littéraire sans nouvel opus d’Amélie Nothomb. La finaliste malheureuse du Goncourt l’an passé revient avec “Les aérostats” (Albin Michel), un livre brillant (son 29e) qui pour la première fois se déroule en Belgique, son pays natal.

Une jeune femme de 19 ans, Ange (qui pourrait être Amélie Nothomb à cet âge) est chargé de donner des cours à un adolescent de 16 ans, Pie, qui se targue de n’avoir jamais lu aucun livre. On laisse aux lecteurs le plaisir de découvrir ce qui se passera entre eux.

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