Pâques est un symbole de foi, de lumière et de renouveau pour une grande partie des croyants, pour d’autres c’est souvent l’occasion de retrouvailles paisibles en famille. Les opportunismes politiques ne sont jamais bien loin.

Par Cadfael

2025 : Les Pâques se rencontrent

Les célébrations chrétiennes, orthodoxes et juives convergeaient vers la même date cette année. Le calcul des dates exactes est assez complexe et donne une idée des traditions différentes menant à une même finalité. La fête chrétienne se place le premier dimanche suivant la pleine lune de l’équinoxe de printemps, selon la définition du concile de Nicée en 325. Le calendrier grégorien, utilisé par l’Église catholique depuis 1582 (introduit par le pape Grégoire XIII), aboutit aux mêmes dates que les calculs basés sur le calendrier julien, qui prévaut chez une partie des orthodoxes. Ce calendrier solaire a été introduit par l’empereur Jules César en 46 avant J.-C.

Le calendrier hébraïque est défini comme un calendrier luni-solaire, composé d’années solaires, de mois lunaires et de semaines de sept jours se terminant le samedi, jour du shabbat. L’année lunaire n’étant pas de la même longueur que l’année solaire — une lunaison moyenne durant 29,53 jours — des ajustements sont nécessaires.

Étymologiquement, Pâques signifie « passage vers la liberté », une vision de la liberté qui diffère selon les théologies. Chez les Hébreux, Pâques marque la libération du peuple juif après des siècles d’oppression pharaonique, tandis que chez les chrétiens, elle symbolise la résurrection du Christ, qui était juif.

Dieu n’est pas un outil politique

Selon la tradition de l’Église catholique, les cloches sont réduites au silence, en signe de deuil, à partir du Jeudi saint. Comme chacun le sait, elles partent alors à Rome pour y recevoir la bénédiction papale et ne reviennent que le jour de Pâques.

On notera que Vance, le numéro deux de la démocrature trumpienne, a assisté à l’office de la Passion du Vendredi saint à la basilique Saint-Pierre avec sa famille. Il avait auparavant rencontré la très agile et très byzantine Mme Meloni, cheffe du gouvernement italien. Le numéro deux a également eu un « échange d’opinions » avec un haut prélat du Vatican. Le pape l’a reçu, sans sa famille, pour une visite privée de quelques minutes, menée de manière strictement protocolaire. François appréciait peu la tournure que prennent les événements aux États-Unis, et il l’a fait savoir.

Rappelons qu’à sa sortie de l’hôpital, jeudi, le pape François avait visité des prisonniers à la prison Regina Coeli de Rome. Il s’y est rendu à bord de sa Fiat 500 blanche, un contraste saisissant avec la cavalcade de limousines blindées accompagnant Vance.

Selon la presse, ce dernier est issu de la branche évangélique conservatrice protestante américaine. Il s’est converti au catholicisme en 2019, sous l’influence de Peter Thiel — milliardaire ultraconservateur d’origine allemande (PayPal, Palantir) — et d’un frère dominicain partageant la même philosophie.

On relèvera qu’en soutien à la campagne de Trump, des associations catholiques intégristes avaient levé une dizaine de millions de dollars et envoyé plus de 5 000 de leurs membres sur le terrain. Selon les médias américains, ces nouveaux fondamentalistes seraient soupçonnés de vouloir infiltrer les institutions afin d’en prendre les rênes.

Amour bien ordonné…

La présence de Vance à Rome ne serait pas due à une crise de spiritualité aiguë, mais à une tentative d’arrangement avec le Vatican face à un véritable problème politique entre Washington et le pape. Parmi les 62 millions de catholiques américains, un tiers sont latino-américains — un important réservoir électoral pour Trump.

Ce pape humain et plein d’humour, humble et réformateur, mais non dénué d’autorité, est depuis longtemps la bête noire des groupes catholiques ultraconservateurs, d’autant plus que François avait rejeté l’argumentation théologique avancée par Vance pour justifier le traitement et la déportation massive de non-Américains.

Vance voulait arranger à la sauce intégriste le concept d’« ordo amoris » de Thomas d’Aquin. Le grand théologien dominicain du 13ème siècle y décrivait l’amour comme un acte de volonté qui doit être bien dirigé. François répondit aux acrobaties théologiques du numéro deux qu’il fallait interpréter ce concept « au regard de la parabole du bon samaritain qui vise un amour qui construit une fraternité ouverte à tous sans exception. » Trump, autre grand croyant, aura certainement apprécié. Heureusement que son équipe de fins lettrés n’est pas tombée sur la bulle papale « ad extirpanda » de 1252. Le Vatican considérant le manque d’efficacité dans l’obtention d’aveux par les hérétiques autorisait par cet acte de droit ecclésial à faire usage de la torture par l’inquisition confiée principalement aux dominicains.

Dans un courrier adressé aux évêques américains en février dernier, François avait mis les points sur les i en qualifiant le plan de déportation massive de Trump de « honte » et de « crise majeure », ajoutant que « ce qui est construit sur la force, et non sur la conviction en une dignité égale de chaque être humain, commence mal et finit mal. » Selon lui, qualifier chaque migrant sans papiers de « criminel » était inadmissible.

François est désormais parti vers l’Orient éternel. Son successeur sera-t-il son héritier ? Toujours est-il que certains y trouvent leur compte.

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