C’est une bombe que vient de lancer Lush, mais elle n’est cette fois ni parfumée ni effervescente. La marque de cosmétiques suspendra dès vendredi, jour consacré au Black Friday, ses comptes sur Facebook, Instagram, Tiktok et Snapchat, “pour offrir un environnement plus sûr” à ses utilisateurs. Chloé Chazot, responsable de la communication Lush pour la France, la Belgique et le Luxembourg, fait le point sur les motivations de la marque, et sur ses attentes envers les plateformes concernées.
Pourquoi avoir pris la décision de fermer vos réseaux sociaux dans 48 pays ?
Cette décision est la finalité d’une longue réflexion à l’égard de ces plateformes et de leurs effets néfastes sur leurs abonnés. En avril 2019, nous avions déjà pris la décision d’arrêter de publier sur certains réseaux sociaux au Royaume-Uni. Lorsque la crise de la Covid-19 est arrivée, des confinements et des couvre-feux ont été mis en place dans la plupart des régions du monde. Avec cette circonstance particulièrement inédite à l’esprit, nous avions décidé de relancer une utilisation limitée des réseaux sociaux que nous avions mis en veille, afin de donner aux gens un maximum de choix, dans un monde où les options étaient soudainement devenues limitées. Aujourd’hui, nous voulons être sûrs de ne pas attendre que les autres prennent conscience du problème, mais plutôt de changer notre propre comportement pour répondre à ces problématiques dès maintenant. Nous avons toujours eu une relation authentique et sincère avec notre communauté. Lush a toujours eu la volonté d’offrir un espace sécurisant pour tous et toutes. Parce que nous souhaitons interagir avec notre communauté de manière directe et sécurisée, nous avons choisi de suspendre nos comptes des plateformes que nous jugeons problématiques et qui ne correspondent pas à notre éthique.
Est-ce temporaire ou définitif ?
Tout dépend des mesures que prendront ces plateformes vis-à-vis de leurs abonnés. Nous pensons que les choses doivent changer maintenant, et espérons que ces réseaux sociaux appliqueront progressivement de meilleures pratiques pour protéger leurs utilisateurs. Il nous semble également essentiel que des législations internationales soient mises en place pour faire appliquer ces bonnes pratiques, mais c’est quelque chose que nous ne pouvons pas nous contenter d’attendre. Nous sentons qu’il est de notre devoir d’agir par nous-mêmes pour protéger notre communauté des dangers et manipulations auxquels elle s’expose lorsqu’elle nous cherche sur les réseaux sociaux.
Concrètement, quelles mesures attendez-vous ?
Notre rôle n’est pas de trouver les solutions à la place de ces plateformes, surtout que nous savons qu’elles les ont déjà mais choisissent volontairement de ne pas les appliquer.
Quel a été le déclic qui a motivé cette décision ?
Les récentes et courageuses alertes sur les dangers que ces réseaux sociaux représentent pour les jeunes ont motivé notre décision et renforcé notre détermination. Lush a toujours été une entreprise militante, nous défendons chaque jour, par nos campagnes de mobilisation et nos prises de position, la protection des animaux, la préservation de l’environnement et les droits humains. C’est pour cette raison que nous ne pouvions pas fermer les yeux sur cette situation très alarmante.
Vous fermerez vos comptes le 26 novembre, pour le Black Friday. Pourquoi ce choix ?
Pour nous, le Black Friday a toujours été un temps fort éthique où nous communiquons sur nos engagements et nos valeurs. En 2017, nous avions, par exemple, soutenu l’association Sumatran Orangutan Society avec notre campagne #SOSsumatra, qui protège les orangs-outans et la forêt tropicale à Sumatra. Nous avions récolté près de 142.000 euros. C’est donc une date symbolique que nous choisissons chaque année pour pouvoir communiquer avec notre communauté.
Pourquoi avoir choisi de rester sur YouTube, et surtout sur Twitter qui est également un réseau social contesté ?
Notre position est de nous retirer des plateformes qui ont choisi d’ignorer leurs propres preuves – mais nous reviendrons s’ils rendent leurs espaces sûrs. En ce qui concerne les autres plateformes, YouTube sera une chaîne dédiée à nos actualités, nos campagnes éthiques, nos valeurs et où il n’y a pas besoin de s’abonner ou de nous liker continuellement pour échanger avec nous. Quant à Twitter, ce canal est déjà réservé à notre équipe Customer Care et le restera.
Les réseaux sociaux sont devenus indispensables pour les marques ces dernières années. Est-ce que cette décision peut vous nuire à terme ?
Notre notoriété s’est construite grâce à nos combats et nos valeurs qui ont su fédérer une communauté fidèle autour de notre marque. Lush n’a jamais fait de publicité que cela soit sur nos réseaux sociaux ou sur tout autre support. Par ailleurs, les réseaux sociaux n’ont jamais été un canal exclusif. Nous avons toujours trouvé des moyens uniques de communiquer directement avec les personnes qui nous suivent lors d’actions de sensibilisation dans nos boutiques ou dans nos journaux Lush Times par exemple. Et nous continuerons également de travailler avec les influenceurs de manière saine et sereine.
Les réseaux sociaux ont-ils pris trop de pouvoir sur les marques ces dernières années ?
Nous avons toujours été un acteur rupturiste du marché et sommes pionniers de la révolution cosmétique, tant grâce à nos innovations que nos engagements depuis notre création. Notre mission est de faire la différence, d’établir de nouvelles normes et d’ouvrir la voie comme nous l’avions fait lorsque nous avons inventé le tout premier shampoing solide il y a 30 ans.
Et s’il ne se passait rien… Quelle serait la prochaine étape ?
Si rien ne se passe en dépit de nos efforts pour générer une prise de conscience globale, notre position restera inchangée.