Par Karin Altmeyer
Est actuellement jouée au TOL Les Enfants, une pièce de Lucy Kirkwood, créée à Londres au Royal Court en 2017, mise en scène collectivement, assistée de Colette Kieffer, avec Véronique Fauconnet, Olivier Foubert et Catherine Marques.
Lorsque rideau se lève, deux femmes, qui se connaissent de longue date, Rose, interprétée par Véronique Fauconnet, et Hazel, jouée par Catherine Marques, apparaissent et parlent ensemble du passé, du présent et de l’avenir… Hazel lui raconte qu’elle et son époux, Robin, interprété par Olivier Foubert, tous deux retraités scientifiques, mènent maintenant une vie calme et saine au bord de la mer, font attention à leur alimentation, mangeant végane, vivent avec un minimum d’électricité et vérifient régulièrement les radiations….Elle pratique le yoga et lui est devenu fermier.
Tout semble aller pour le mieux dans le meilleur des mondes et ce, en dépit d’un détail qui n’est pas des moindres, à savoir que ce no where où ils vivent, se situe près d’une centrale nucléaire de leur ville qui a explosé ! Cette catastrophe n’est pas sans rappeler celle de Fukushima survenue le 11 mars 2011 ou celle de Tchernobyl.
Alors que le monde s’effondre autour d’eux, que tout est sinistré, voire dévasté, et que les gens qui y vivent et y travaillent, s’exposent à des radiations mortelles, Rose, une ancienne collègue ingénieure en nucléaire, refait surface plus de 30 années plus tard…Mais que vient faire Rose, que veut elle après tant d’années ? Pour quelle raison veut elle reprendre contact avec eux ? Est-elle toujours amoureuse de Robin avec qui elle a entretenu par le passé une liaison ?
Le retour de Rose, dont la présence semble, au début, légère et joyeuse, va venir perturber le quotidien de ce couple d’ingénieurs retraités dans leur petite vie si bien rangée !
Avec une scénographie de Julieta Fernandez et dans un décor d’ Osvaldo Medina très années 70, totalement écoresponsable , étant composé de table, chaises et évier en bois, notre trio évolue dans un huis clos parfois oppressant, échangeant des paroles plus ou moins aimables, leur permettant ainsi de régler leurs comptes ! Grâce à cette pièce, on retrouve la génération des années 70 idéaliste, convaincue des développements et des progrès du nucléaire !
Véronique Fauconnet interprète à merveille Rose , cette femme qui assume totalement son indépendance, ayant toujours mené la vie qu’elle entendait. Elle rayonne. Olivier Foubert est drôle dans son personnage de Robin, semblant encore et toujours épris de ces deux femmes, Rose et Hazel ! Quant à Catherine Marques, elle joue remarquablement Hazel en mère aimante et cela devient comique quand elle organise une chorégraphie (de Gianfranco Celestino), entraînant Rose et son mari.
Drôle jusqu’à ce que Rose révèle la raison de sa présence : sauver l’avenir de la prochaine génération au péril de leur vie ! Les anciennes générations sont confrontées aux choix qu’elles doivent faire et assumer pour les futures générations, en proposant de remplacer les jeunes actifs de la Centrale et de protéger, ainsi, les générations futures. Face à cette demande de sacrifice formulée par Rose, les enfants qui étaient, jusqu’alors absents, deviennent omniprésents.
Cette comédie à l’humour noir fut jouée au Royal Court, puis à Broadway. Elle est drôle et captivante. Elle fait réfléchir quant à la responsabilité des adultes face aux défis de l’environnement, face à l’avenir des plus jeunes. On comprend que cette pièce ait reçu le prix de la meilleure pièce aux Writers Guild Awards 2018.
Cette magnifique tragicomédie, plus que d’actualité traitant des risques du nucléaire, nous interpelle quant au monde que nous voulons laisser à nos enfants.
À voir absolument !
Cette pièce sera encore jouée à 20.00 heures les 12, 13, 14, 15, 19, 20, 21, 25, 26, 27 et 28 octobre 2022 au TOL : https://www.tol.lu/spectacles/les-enfants/