Par Cadfael
Les affaires écornent l’église catholique. Il semblerait qu’un homme tente de renverser le cours de l´Histoire.
Le lisier du diable
Le Vatican est non seulement un concentré d’architecture et d´histoire mais également le siège de l’église catholique. Symbole de 2000 ans de règne, on peut y admirer les magnifiques œuvres de Bramante (basilique St Pierre) ou de Michel-Ange (chapelle Sixtine) toutes à l’image de la grandeur du siège de l’église regroupant 2.2 milliards de fidèles à travers le monde. En grattant un peu on s’aperçoit que le management de cette méga-structure nécessite de gros œuvres de restauration. L’actuel « patron », le pape François, a fait de l’assainissement et la gestion éthique du Vatican un des piliers de son mandat. « Erreurs et actes frauduleux » semblent être sanctionnés… du jamais vu. Qualifiant l’argent de « lisier du diable » ce pape va à contrecourant.
Les voies de la gestion vaticane sont impénétrables
Il semblerait que parmi les nombreux chantiers, le plus urgent soit celui qui touche à la gestion financière du Vatican et à l’éthique des apôtres du seigneur sur cette planète. Deux affaires parmi les plus symboliques méritent un petit rappel.
Rappelons-nous celle de l’appartement du cardinal Bertone, il y de cela quelques années. (2014/2015)
Ce cardinal, qui avait probablement oublié le rappel du pape François d’une église des pauvres, a pris un appartement de fonction de 600 m2 avec une terrasse de 100m2, juste à côté de la résidence St. Martha, appartenant au Vatican. C’est ici que François a choisi d’occuper un logement qualifié de spartiate. Il estime que le luxe des appartements pontificaux ne cadre pas avec les enseignements de l’église. Selon la « Repubblica », l’appartement du cardinal a dix fois la taille de celui de son chef. Bertone, qui d’après la presse italienne, semblait avoir de bonnes relations avec le versant gris de la politique italienne, a dû démissionner. Il en a été de même en 2013 avec la suspension de l’évêque du Limbourg, qui s’était construit un palais résidence, dans le grand style des évêques de la renaissance. Le projet devait coûter 5.5 millions d’euros pour culminer à 31 millions, le tout financé avec les deniers des croyants. Les changements sont durs à naître, mais semblent bien en cours, comme le montre un autre scandale un peu plus récent.
De l’immobilier de luxe
En 2018 François avait reçu en audience privée un certain M. Torzi et sa famille, honneur réservé aux plus importants. Le même Torzi est l’objet, selon le Financial Times de juin 2020, d’enquêtes criminelles et se trouve sur la liste mondiale des suspects de crimes financiers lourds. Le 21 avril dernier, un mandat d’amené a été lancé contre M. Torzi et certains de ses comparses par le parquet de Rome qui agit sur une demande d’entraide du Vatican, ce qui est nouveau pour Saint Siège. M. Torzi se trouvant opportunément à Londres. Il avait déjà été arrêté une première fois en juin dernier, par la gendarmerie vaticane, puis relâché. Il avait non seulement engrangé une commission de 15 millions d’euros, selon l’hebdomadaire italien Espresso, pour des prestations non fournies. Il voulait garder les bien acquis au nom du Vatican pour lui-même, ce que l’accusé dément. Le bien en question est un immeuble luxueux à Chelsea, à Londres, l’achat passant selon la presse anglo-saxonne, par une société luxembourgeoise, Gutt S.A. A la lecture d’un article du Financial Times apparaissent des personnages douteux, des avocats sulfureux travaillant pour le cabinet EY, des intermédiaires originaires du sud de l’Italie, ayant fait un passage à la case prison, des prêtres à problèmes. On y retrouve toute une faune qui aurait bien besoin d’aller a confesse et qui probablement devrait faire pénitence pendant un certain nombre de siècles. Le cardinal Becciu, d’origine sarde, qui a initié le deal, a démissionné pour cause détournement de fonds. La perte actuelle du Vatican de situerait autour de 400 millions d’euros selon l’Espresso du 12 avril dernier.
Une nouvelle loi anti-corruption
Le 29 avril dernier, la presse italienne et internationale se sont fait l’écho d’une nouvelle loi publiée par le Vatican annonçant qu’un vent de rigueur est en train de souffler sur une administration financière qualifiée d’opaque.
Le tout a été précédé, selon l’agence catholique CNA, par le changement de tous les responsables des diverses administrations financières du Vatican. François a ensuite créé une « banque centrale » qui aura en charge la gestion des fonds du petit état, gestion laissée actuellement aux diverses administrations papales, dont les analystes concordent pour dire que la destination des fonds est parfois plus que mystérieuse.
François a fait clairement comprendre que « erreurs et actes frauduleux » seraient sanctionnés. Les cadeaux reçus ne pourront pas dépasser 40 euros et tous les fonctionnaires du Vatican doivent avoir un casier judiciaire propre et n’avoir jamais été condamné. De plus il ne doit pas y avoir de conflits d’intérêts entre les biens privés et la fonction. Le Vatican veut clairement se mettre en conformité avec les règles de Moneyval, le comité d’experts du Conseil de l’Europe évaluant la mise en conformité avec les règles anti-blanchiment et de lutte contre le terrorisme. L’Agence CNA pose clairement et sans détours le problème. Elle titrait le 23 avril dernier : Le Vatican réussira-t-il le Moneyval test ?
En tout cas, sacré personnage que ce François qui n’a peur de rien. Lorsque l’on sait que certains de ses prédécesseurs sont décédés de mort subite et que les clans et réseaux sont solides au sein de la haute administration vaticane, il mérite notre respect pour tenter de mettre les écrits en phase avec la réalité dans un appareil de pouvoir vieux de 2000 ans.