Oui, les enfants peuvent être vraiment amoureux ! Ce sont les spécialistes de l’enfance qui l’affirment. Et il faut les croire. Sinon comment expliquer les hugs de ce Roméo en culottes courtes, qui, chaque matin, à l’école, serre très fort ma fille de 7 ans, contre son cœur ?  « Un ami ! », affirme la Juliette. Ben voyons…

Par Fabrice Barbian

« Je ne suis pas amoureuse ! ». Tous les matins, depuis un mois, ma fille de 7 ans me l’affirme. Il faut dire que je ne manque pas de profiter du petit-déjeuner pour l’interroger sur ce « zozo » de 7 ans (bientôt 8 !) qui l’enlace tous les jours à son arrivée à l’école, avec tendresse. Et la petite qui ne repousse pas franchement les assauts de ce damoiseau qui a même l’outrecuidance de fermer les yeux comme pour mieux savourer l’instant magique. Ou pire encore, afin de zapper le daron qui gâche le paysage ! Elle n’est donc pas amoureuse et « ce n’est qu’un ami », précise-t-elle. « Et lui il en dit quoi ? ». « Ben ça je ne sais pas ».

Pour en savoir un peu plus sur ce qui se trame, je me suis donc renseigné afin de répondre à une question très précise : les enfants peuvent-ils vraiment être amoureux ? La réponse est « oui ! ». Quelques explications. On ne parle pas là de l’amour ou de l’affection que ressent un bébé ou tout jeune enfant pour ses parents et les personnes qui prennent soin de lui, mais bel et bien du sentiment amoureux dans le sens où nous, adultes, l’entendons et le ressentons. Il se manifeste généralement après 5 ou 6 ans, quand l’enfant en a terminé avec son fameux complexe d’Œdipe (voir ci-contre) et qu’il comprend alors que se marier avec sa maman ou avec son papa, ça ne va pas être possible.

« L’amour est formateur dans le sens où tomber amoureux c’est faire un pas de plus vers davantage d’autonomie et d’indépendance »

Comme les grands, enfin presque

Cette période de la vie coïncide avec la montée en puissance des relations que les enfants entretiennent, entre eux, à l’école, lors de leurs jeux, notamment. Autant d’occasions au cours desquelles ils expérimentent et s’enrichissent pour forger des relations sociales. Ce qui est important pour leur développement et pour leur vie d’ado et d’adulte, plus tard. Et qui dit relations, dit forcément affinités, complicité, attirance, séduction, émotions… Et amour. À lire les spécialistes, cet amour ressenti parfois dès la maternelle, plus souvent lors de l’entrée en primaire, est alors comparable avec le sentiment amoureux des adultes. Comprendre que les « concernés » désirent passer du temps avec l’être aimé, sont sensibles, à ses marques d’affection, ressentent les petits papillons, se désolent de l’absence de l’autre… Cela peut aussi se traduire par des bisous, des mains qui se cherchent, des « hugs » appuyés…  Et l’amour est aussi « formateur » dans le sens ou tomber amoureux c’est faire un pas de plus vers davantage d’autonomie et d’indépendance. Romantique, quoi. Si on peut parler d’une forme d’excitation physique – de pulsions – il n’est alors pas question d’attirance sexuelle. La sexualité viendra en son temps, avec la puberté.

C’est du sérieux

Mais pas question de trop la ramener ! Va même me falloir penser à changer de sujet de conversation entre deux tartines pour ne pas perturber le duo (je n’ai pas dit : couple), car les experts sont formels. Les sentiments sont sincères, il importe donc de ne pas prendre la relation à la légère, de juger, de trop questionner ou pire encore, de se moquer. Bref, il faut se faire discret et laisser couler. Tout en restant à l’écoute, bien évidemment, si l’enfant est désireux d’en parler ou en cas de chagrin d’amour, car cela peut aussi arriver. Ils peuvent même faire mal, mais dans la grande majorité des cas, ils passent très vite.  Dans les bras d’un autre ? La littérature dédiée ne le précise pas et je ne veux pas le savoir. Un dernier conseil partagé par les pédiatres, car la « chose » peut arriver. Si vous surprenez votre enfant en train de jouer à « faire l’amour », (je sais, je sais…), il faut éviter d’en faire un drame et de le punir. Il faut lui expliquer qu’il pourra faire l’amour quand il sera un adulte, précisent les spécialistes même si on peut imaginer que les galipettes risquent fort d’arriver un peu plus tôt que prévu, à l’adolescence. Un point sur lequel, je ne préfère pas m’étendre pour l’instant, l’angoissante générosité affective de « notre Roméo » ayant franchi un nouveau cap : il s’est mis en tête d’organiser une soirée « pyjama », en tête à tête avec sa Juliette.