L’image et la confiance dans les États-Unis étaient sérieusement cabossées après le passage de l’ouragan Trump. Le président Biden, qui n’a cessé de souligner un attachement aux valeurs de l’état de droit et à ses racines européennes est venu vers la vieille Europe et a initié une activité diplomatique intense en vue de recoller ce qui pouvait l’être.
Le G7
Le week-end dernier nous avons eu droit, aux manœuvres du 47ème G7 qui se tenait à Carbis Bay dans les Cornouailles. Il réunissait à partir du 11 juin jusqu’au dimanche 13, l ‘Allemagne, le Canada, les États-Unis, la France, l’Italie, le Japon, l’ensemble sous la présidence du Royaume Uni. En 2014, la Russie fut suspendue après l’annexion de la Crimée. En 2018, elle prit la décision de quitter ce Forum.
Le G7 a été mis en place durant les années 70 suite à la crise provoquée par le choc pétrolier et l’effondrement des accords de Bretton Woods qui fixaient les principes des relations financières entre puissances économiques.
L’Afrique du Sud, l’Australie, la Corée du Sud, l’Inde et l’Union Européenne sont les puissances invitées par les pays du noyau dur. La liste des participants marque bien le nouveau front que les États-Unis comptent mettre en place pour contrer l’hégémonisme agressif de la Chine, qui par une stratégie subtile et à long terme misant sur la création de dépendances économiques et financières, a réussi à devenir omniprésente et parfois indispensable.
Reconstruire
La presse française s’est focalisée sur des sujets comme le vaccin et un don de vaccins aux pays tiers, la sortie de la pandémie, le changement climatique comme résultat d’un sommet dont le but essentiel était de resserrer les liens autour de nations économiques fortes partageant les mêmes valeurs. Biden lançait son programme « Build Back a Better World ( B3W) » « reconstruisons un monde meilleur » avec le but d’offrir une alternative qualitativement meilleure par rapport aux propositions chinoises issues de la stratégie de la « Route de la soie ». Une aide substantielle a été promise aux nations plus faibles afin de les soutenir dans leur effort pour sortir de la crise et en cela bloquer la pénétration de plus en plus importante de la Chine.
On aura noté la manifestation d’une liaison forte entre Jo Biden et Boris Johnson qui ont déclaré une « amitiés indestructible entre leurs pays ». Les deux pays ont également approuvé une nouvelle « Charte de l’atlantique » qui insisterait sur les dangers grandissant des cyberattaques essentiellement d’origine russe et chinoise.
Selon la BBC une des préoccupations principales de Johnson, demeurait la récupération face au Covid et comment construire “un système de santé global plus solide qui peut nous protéger tous de pandémies futures ». Pour Boris Johnson et Jo Biden un sujet délicat a été réservé aux entretiens privés : la paix en Irlande du Nord, fortement fragilisée par le Brexit. Jo Biden a des racines irlandaises et s’est toujours déclaré en défaveur du Brexit.
Biden, Merkel et Poutine
La présence quasi immanente de l’ours russe, démon traditionnel États-Unis, marque la rencontre privée qualifiée d’amicale entre Biden et Merkel, la future ex-dame la plus puissante de la planète. Entre un Jo Biden qui n’avait pas hésité à traiter Poutine de tueur et Mme Merkel, bientôt à la retraite, il reste le projet Nordstream 2 , ce gazoduc devant acheminer son précieux produit russe vers une Allemagne à l’économie vorace d’énergie. L’américain est contre car sa mise en service priverait l’Ukraine des milliards provenant des taxes de transit, agrandirait la dépendance européenne par rapport à la Russie et priverait les États-Unis d’un business lucratif. Il semblerait que dans cet entretien bilatéral entre les deux chefs d’état, un début d’issue ait été trouvé et que les négociations restreintes vont se poursuivre en vue d’un règlement satisfaisant .
Un sommet de l’Otan capital
Lundi dernier sommet de l’Otan à Bruxelles où les divers chefs d’état présents, faisaient de leur mieux pour avoir quelques minutes d’entretien avec un Jo Biden qui soulignait que les États-Unis étaient de retour dans une l’Alliance qui était fondamentale pour les intérêts américains.
En 2014 les membres de l’Otan avaient convenu d’un seuil minimum de dépenses militaires de 2% du PIB. Selon une publication de l’Otan de la semaine dernière, seuls les États-Unis, le Royaume-Uni, la Grèce, la Croatie, l’Estonie, la Lettonie, la Pologne, la Lituanie, la Roumanie et la France ont atteint ou dépassé ce niveau. Au Luxembourg, mauvais élève, nous sommes à 0.57% du PIB, lanterne rouge qui n’en fait pas assez. La hausse des dépenses militaires russes et chinoises ne semble pas nous impressionner, au regard de la présence des banques sur notre territoire… sans doute croyons-nous en leur bienveillance. Quoiqu’il en soit les 30 pays réunis au sommet de l’Otan à Bruxelles ont déclaré il y a trois jours que la Chine « représentait un risque systémique » et que l’organisation allait être redynamisée en vue d’une défense forte et commune contre les risques militaires tiers.
Genève, la rencontre des rencontres
Hier, Genève était en état de siège. Blindés, barbelés et colonnes de SUV et de limousines blindées ont marqué le quotidien de la ville. Biden offrait une rencontre à Poutine en territoire neutre. Poutine se voyait enfin promu au rang de leader à stature mondiale, lui dont Obama parlait comme d’un politicien d’une puissance régionale.
L’Objectif de la Maison Blanche était, selon les experts, d’obtenir de Poutine un comportement moins “disruptif”, plus prédictible en instaurant un niveau de confiance minimal.
Dans sa conférence de presse après quatre heures d’entretien avec le président Biden, le maitre de toutes les Russies (ou presque) est devenue philosophe: à la question de savoir si cette rencontre au sommet avait été utile dans l’établissement de liens de confiance entre les deux puissances :”Il n’y a pas de bonheur dans la vie, il n’y a qu’un mirage à l’horizon. Alors respectons cela /…./ mais je crois qu’il y a une étincelle d’espoir dans les yeux (de Biden).”. Et in fine, Poutine continuera probablement à faire en toute impunité ce qu’il considère comme le mieux pour ses intérêts et ceux de la Russie.
Et pour le président américain, les buts de cette premier rencontre étaient de faire connaissance afin de pouvoir organiser les prochains pas. “Toute politique étrangère est une extension logique des relations personnelles. C’est de cette manière que fonctionne la nature humaine” a -t -il déclaré. Un premier petit résultat est là: Poutine a annoncé que les ambassadeurs des deux pays, qui avaient été rappelés, après que M. Biden ait traité le président russe de tueur, retourneraient à leur lieu de travail.
Par Cadfael