Texte par Cadfael
Très récemment les résultats du « World Coompetitiveness ranking » ont été publiés par IMD, une structure suisse spécialisée dans la recherche et la formation. Une fois n’est pas coutume, le Grand-Duché marque un peu le pas.
La compétitivité du Luxembourg aurait glissé de trois points vers le bas pour se placer en 15e position pendant que les pays limitrophes bougeaient également : deux points pour la Belgique qui se place en 27e position et une perte d’un point pour la France qui descend à la 32e position, la RFA reste égale à elle-même en 17e position. On peut interpréter ce genre d’analyse comme s’il s’agissait du résultat d’une compétition sportive ou se poser une question face à tous les index qui fleurissent, s’ils constituent l’ultima ratio.
Pour ceux qui veulent connaitre le score du Grand-Duché : www.imd.org/wcc/world-competitiveness-center
Happiness Index
Débutons par le « Hapiness Index » qui dans son édition 2020 met l’accent sur l’environnement social, urbain et naturel ainsi que sur la manière dont ces éléments influent sur la notion de bonheur. Cet index trouve son origine dans une résolution de juin 2011 prise par l’Assemblée Générale de l’ONU sur initiative du Bhoutan qui invitait les gouvernements nationaux à donner plus d’importance au bonheur et au bien-être dans la réalisation du développement social et économique. La résolution préconisait ainsi de remplacer la notion de produit national brut par celle de bonheur national brut. Cette idée reprise par des professeurs d’universités canadiennes et anglaises, disposant de moyens de modélisation conséquents, est devenue l’index du bonheur. Une tentative luxembourgeoise, il y a quelques années de cela, de réaliser un index de ce type, spécifique au pays n’a pas donné de résultats.
Le Luxembourg passe donc de la 14e position en 2019 à la 62e dans le dernier classement publié en 2020. Cette dégringolade est causée par de mauvais résultats sur le plan de l’environnement, que les très bons résultats en matière de qualité de vie, de non-discrimination, d’intégration des non-nationaux n’ont pas réussi à contrebalancer. Comme cet index est axé préférentiellement sur l’environnement, le bonus premier s’envole et le pays caracole en queue de classement. Une des curiosités de cet index est que les États-Unis sont en 108 position sur 140 mais que leur empreinte écologique est meilleure que celle du Grand-Duché.
https://worldhappiness.report/ed/2020/
L’index de performance environnemental (EPI)
L’EPI est réalisé par l’Université de Yale. Il compile des politiques environnementales en utilisant des bases de données aux paramètres scientifiquement mesurables. Dans l’index 2020 le Luxembourg réalise un score qui le place en seconde position sur 180 pays passés en revue. Il se classe en fonction des secteurs passés en revue, soit en seconde, soit en première position dans un trio de tête qui est composé de la Suisse, du Danemark, et de la Norvège. Dans les domaines de la santé environnementale et de vitalité de l’écosystème l’EPI porte au crédit du pays les efforts faits ces 10 dernières années en matière environnement, que ce soit en matière de changements climatiques, du contrôle d’émission de la pollution ou de préservation des ressources aquatiques et la qualité de l’air Deux ombres au tableau, les émissions de méthane et la gestion des engrais azotés en agriculture.
https://epi.yale.edu/epi-results/2020/country/lux
Energy Transition Index
Cet index annuel est édité par le Forum Économique Mondial. Le Luxembourg s’y retrouve en 14ème position sur 115 pays. Comme le soulignent les rédacteurs de l’index, il crédite le pays d’une volonté manifeste de réaliser une transition acceptable et il reflète les progrès faits sur les six dernières années. Le rapport précise qu’il y a un besoin de solutions inédites et fortes afin de débloquer un potentiel de transformation très spécifique aux économies avancées. Ces gains ne pourront être que marginaux au sens économique du terme au risque de déséquilbrer des dynamiques de croissance qui doivent se reconstruire car fragilisées e.a. par la pandémie COVID.
https://www.weforum.org/reports/fostering-effective-energy-transition-2020
Global Social Mobility Index
Le Luxembourg se retrouve encore une fois dans le haut du panier, en ce qui concerne la mobilité́ sociale. Il est en 10ème position après les pays nordiques les Pays-Bas la Suisse et la Belgique. Ce que le Forum Economique Mondial, qui édite cet index, considère comme des freins majeurs à la mobilité sociale, à savoir de bas salaires, un manque de protection sociale et l’absence de structures formation permanente, ont été éliminés par le pays. A en juger au vu des résultats, le Luxembourg est performant. http://reports.weforum.org/
Doing Business Ranking
Le classement 2020, édité par la Banque Mondiale, analyse de manière approfondie dix éléments importants qui permettent d’établir une activité économique au Grand Duché ou de l’exercer. La position du Grand-Duché est très moyenne, coincée en 72ème position sur 190 pays analysés, entre la Jamaique et l’Indonésie. Il fait ressortir les maladies chroniques du pays : lourdeurs juridiques et administratives de certains secteurs (même si sur le plan procédural et l’ouverture vers les administrés, la mécanique fonctionne bien). Sont surtout en cause les points suivants : difficultés importantes en matière d’obtention de crédits bancaires, protection des investisseurs minoritaires, et toujours la loi sur les faillites, cette loi qui mérite réforme depuis des années et à laquelle aucun gouvernement ne veut toucher.
https://www.doingbusiness.org/en/rankings
L’Index sur le criminalité de Numbeo
Numbeo est la plus grande base de données mondiale sur les coûts et conditions de vie dans presque 10.000 villes. Une analyse de 129 pays permets à l’index de Numboe de donner au Luxembourg une criminalité « faible » en le plaçant en 36 ème position des pays les plus sûrs, dévancé par la Suisse, la Slovénie, le Portugal et l’Autriche, suivi de peu par l’Allemagne et de très loin par la France et la Belgique.
https://www.numbeo.com/crime/rankings_by_country.jsp
Nation Branding Index
Bloom Consulting, avec domicile à Londres, édite ce classement qui a pour but de mesurer la perception de l’image d’un pays et de son évolution.
En 2017 le Grand-Duché, à grands frais, s’est doté d’une politique de Nation Branding, en s’inspirant d’un slogan qu’une société de communication luxembourgeoise utilisait durant les années quatre-vingt. L’effort porte-t-il ses fruits ? Le Luxembourg se trouve en 24ème position sur 42 pays européens. Le quatuor de tête est composé de l’Espagne (1er), suivie du Royaume-Uni, de
l ‘Italie, de la France et de l’Allemagne. Il sera intéressant de noter l’impact qu’aura le Covid sur ce classement.
https://www.bloom-consulting.com/en/country-brand-ranking
Tout est dans le tout et rien est dans rien
Des index il y a en a beaucoup et il convient de ne pas les prendre pour argent comptant ni d’en faire des anathèmes. En fin de compte ils nous disent une chose: Le Luxembourg a sa voie qui n’est certainement pas parfaite mais qui permet aux citoyens du pays de vivre et de travailler dans les meilleures conditions possibles. D’un autre côté, c’est la classe politique qui se doit de corriger les déficiences motrices d’un modèle qui n’a pas réglé les héritages du passé. Il va falloir être créatif pour reinventer un modèle de croissance à court terme dans un système qui repose sur une monoindustrie, les finances et qui néglige trop souvent l’économie réelle. Faut-il trois savantes études comme l’a fait l’Uni Lu très récemment pour constater selon RTL que « beaucoup de Luxembourgeois recherchent un confort personnel à court terme et délaissent la politique ou le vivre-ensemble » (RTL.lu 25 janvier 2020).
Nous le savions depuis longtemps que les citoyens de ce pays prennent des distances par rapport aux politiques. Xavier Bettel a réussi à créer un début de dynamique en sens contraire. Souhaitons que la graine prenne.
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