Infirmière psychiatrique et présidente du département OGBL Equality, Tina Koch voit les inégalités au quotidien. Elle se bat pour un monde plus égalitaire et respectueux.

Pouvez-vous nous expliquer votre travail au sein de l’OGBL ?

« Je suis infirmière psychiatrique en formation pour être Infirmière en Prévention et Contrôle de l’Infection. Je suis aussi déléguée du personnel. J’accompagne les gens dans l’entreprise. Au niveau national, je suis présidente de l’OGBL Equality. Le département des femmes de l’OGBL existe depuis 1981, mais on l’a renommé Equality l’année dernière pour être plus inclusif. Concrètement, on surveille le terrain par rapport à l’égalité entre hommes, femmes et tous genres. « Conditions de travail, retraite, sécurité sociale », c’est un peu notre crédo.

Comme les chiffres sont peu nombreux, on recueille des informations qui prennent en compte les genres au niveau national. On propose aussi des outils à nos délégué•e•s pour les aider à valoriser la parité et l’égalité dans les entreprises. Parfois, les gens ne se rendent pas compte des inégalités qui existent. On aide aussi avec des formations, des boîtes à outils afin que les délégué•e•s et salarié•e•s du terrain puissent mettre en pratique des projets concrets »

Est-ce que les délégué•e•s dans les entreprises font beaucoup de demandes pour la partie Equality de l’OGBL ?

« Actuellement, je dois dire que non, mais je ne veux pas remettre la faute sur les entreprises, c’est surtout à cause de la situation Covid. Lorsque l’on s’est lancé•e•s plus activement, elle nous a rattrapés. Le manque de réunions et la distance rendaient le travail bien plus difficile pour Equality comme pour toute•s les délégué•e•s sur le terrain. C’est un temps très difficile avec d’autres priorités malheureusement. Mais j’espère qu’après la Covid, ça reviendra. En attendant, on a élaboré une boite à outils pour les écoles, que les instituteur•trice•s peuvent utiliser. On fait aussi des formations en ligne, mais ce n’est pas pareil qu’en live. On essaie d’être assez présent•e•s sur les réseaux et au sein de la plateforme Jif dont on est membre. A priori, on est le point de contact des salarié•e•s et de leurs représentant•e•s dans les entreprises, pas des employeurs.  »

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Tina Koch OGBL Equality pour la Jif

Vous travaillez aussi en tant qu’infirmière, que faites-vous ? 

« Je travaille au CHNP où il y a un département psychiatrie, réhabilitation psychiatrique, une maison de retraite et un secteur pour le handicap. Avant en psychiatrie, je suis maintenant transversale dans le Service Prévention et Contrôle de l’Infection. Je fais l’accompagnement Covid en ce moment. Sinon je m’occupe de toute la prévention des infections nosocomiales (infections qui sont acquises dans un établissement de soins, ndlr) qui peuvent apparaitre. »

À travers vos deux casquettes, comment voyez-vous la situation de la femme au Luxembourg ?

« Depuis mon plus jeune âge, les inégalités m’ont toujours rendue folle, pas seulement entre femmes et hommes, mais toutes. Pour moi, le but est de vivre ensemble, peu importe qui on est. En tant que déléguée du personnel et infirmière psychiatrique, j’ai rencontré beaucoup d’inégalités dans la vie de tous les jours et dans le monde du travail. Surtout dans la santé, les conditions de travail sont très inégalitaires. Les secteurs plus féminisés rencontrent toujours des problèmes. Le nettoyage, le commerce, l’horeca, souvent très féminisés, n’arrivent pas à avoir une certaine reconnaissance et un salaire correct.

Dans le secteur de la Santé, Services sociaux et éducatifs, grâce à une bonne Convention Collective, on a un bon salaire. Mais nos diplômes ne sont quand même pas reconnus comme ils le devraient. Pour ma formation par exemple, je voulais m’inscrire à l’étranger et on m’a dit que mon diplôme d’Infirmier n’était pas valable parce qu’il manque une reconnaissance européenne, le Bachelier. Je me demande si c’est uniquement dans les secteurs féminins ou si ça existe aussi dans les autres secteurs. »

Quelle serait votre définition propre du féminisme ?

« C’est la lutte contre les inégalités, mieux vivre tout•e•s ensemble. Je dis toujours que les lois ne sont écrites ni au masculin ni au féminin. On lutte pour une société plus équitable qui bénéficie à tout le monde. Mais du point de vue féminin, pour moi c’est important de donner de la force à la voix des femmes. Notre société n’est pas encore tout à fait prête à voir les hommes et femmes au même niveau. »

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Tina Koch OGBL Equality pour la Jif

Quelles sont les femmes qui vous inspirent ? 

« Je n’ai pas vraiment d’idole dans les célébrités. Une femme qui m’inspire par exemple c’est Nora Back, présidente de l’OBGL. Et sinon chaque femme qui s’est lancée dans la politique ou dans le syndicalisme et qui a essayé de changer quelque chose, qui a osé dire à haute voix le contraire de ce que disent les hommes. » 

Que voudriez souligner en ce mois de la femme ? 

« Mon expérience à la plateforme Jif. Je suis impressionnée par le nombre d’organisations différentes qui travaillent sur une vision commune. Tout le monde respecte l’autre, malgré les différences de genres, d’âges, de cultures, de façon de vivre ou de penser. On arrive à définir une vision et à travailler ensemble et j’aimerais voir ça se généraliser. Le monde politique comme le monde du travail ont besoin de montrer qui est le plus fort. La culture sociétale manque. Il faut lutter contre les inégalités pour que chacun•e ait les mêmes chances et que tout le monde se respecte. »

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Tina Koch OGBL Equality pour la Jif

Y a-t-il quelque chose d’autre que vous voudriez nous partager ?

« Je me soucie beaucoup des femmes âgées qui parfois doivent vivre avec la pauvreté. Nous avons appris à travailler et avoir ensuite une retraite, mais beaucoup de femmes n’avaient pas cette chance. Maintenant, avec le prix des logements et des maisons de retraite, elles ont du mal à vivre. Ce sont ces dames qui ont construit le monde actuel et qui se sont battues pour que je puisse avoir la vie que j’ai. La pauvreté dans l’âge m’attriste vraiment. »

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