Quand on a l’étoffe d’un cheffe d’entreprise, rien ne sert de tenter de s’y soustraire. Odette Tonnaer est une entrepreneure née, que le destin a rattrapé.
Pragmatique et fonceuse, elle a su mettre en œuvre les bonnes pratiques auxquelles elle doit son immense succès. Généreuse, elle souhaite à présente transmettre ses savoir-faire. Rencontre avec une cheffe inspirante.
Pouvez-vous nous raconter votre parcours ?
Je me préparais à embrasser la carrière médicale, quand les hasards de la vie m’ont conduit à codiriger un établissement hôtelier dans la région viticole Luxembourgeoise. Durant cette période, je me suis aussi investie dans la vie publique en qualité de membre de la commission d’Égalité des Chances et membre de la commission de la Culture. En 1994, j’ai créé une Galerie d’Art Contemporain, annexée à notre entreprise, dans laquelle j’exposais des œuvres d’artistes internationaux et où j’organisais des soirées littéraires et musicales, souvent sous le haut patronage des ambassades. En 2003, j’ai décidé de retourner vers ma formation d’origine, c’est-à-dire le corps humain. C’est ainsi qu’est né Yoaké the Ultimate Spa, qui repose sur une approche holistique avec des prestations ciblant la longévité, le stress management et le rajeunissement de la peau.
Était-ce fondamental pour vous de créer votre société ? Qu’est-ce qui vous a poussé à sauter le pas ?
C’était tout simplement pour moi la suite logique. Issue d’une famille industrielle, l’esprit entrepreneurial fait partie de mes gènes. C’est inné ! Je n’ai jamais eu des hésitations ni de doutes à ce niveau.
Quelles difficultés avez-vous rencontrées dans votre entreprise ?
Une entreprise doit toujours faire face à des difficultés, de tous ordres, c’est normal. Cela fait partie du quotidien. Savoir les gérer à fur et à mesure qu’elles se présentent et, ainsi, en tirer les leçons nécessaires est également une forme d’évolution. L’art est de rester serein. Pas toujours facile, mais indispensable.
De quels soutiens avez-vous bénéficié ? Quels soutiens auriez-vous souhaités ?
J’ai bénéficié d’un excellent soutien de la part du ministère de la Classe Moyenne, la direction générale PME. Un accompagnement précieux et très efficace au niveau du droit d’établissement, et surtout la simplification administrative qui m’ont permis de pouvoir me concentrer sur l’essentiel de mon business, c’est-à-dire la mise en place de mon concept Yoaké
Qu’apporte la FFCEL aux femmes qui souhaitent se lancer dans l’entrepreneuriat ?
La FFCEL défend les intérêts des entrepreneures auprès des instances politiques et économiques, elle invite à un partage d’expériences entre paires. Dans une économie ouverte et concurrentielle, se rapprocher de l’autre est psychologiquement bénéfique. La FFCEL apporte aux femmes qui se lancent des informations privilégiées et pertinentes. Elles pourront également bénéficier d’un accompagnement bienveillant de la part des femmes déjà actives sur le marché, et ainsi se sentir moins seules et également tisser des amitiés. D’autant qu’en tant que cheffe d’entreprise, il est important d’être liée à plusieurs business-club, de se montrer là où les décideurs sont présents, et de faire partie du dynamisme de l’économie du pays. Personnellement, je fais souvent appel à mes connaissances de ces réseaux pour mon business et, d’ailleurs, j’ai intégré deux jeunes femmes inspirantes et très qualifiées dans mon entreprise, sous forme d’entrepreneuriat collaboratif, suite aux rencontres moyennement des réseaux business.
Pouvez-vous nous expliquer votre démarche lorsque vous avez voulu créer votre concept Yoake ?
J’ai commencé la création du concept bien avant l’ouverture du Spa. Ce processus a duré presque trois ans. En passant par une étude du marché local à des visites bien ciblées dans les meilleurs Spa de l’Europe, afin de bien comprendre les besoins réels et également pour mieux pouvoir me préparer pour le marché luxembourgeois, qui reste encore toujours atypique avec tant de cultures différentes. Ayant fait le choix de créer un concept de Spa de Luxe, il me faillait un emplacement prospère. Après l’acquisition des murs, ancienne imprimerie de la BCEE, j’ai entamé les démarches de rénovation des lieux. Son architecture et son aménagement intérieur ont été entièrement conçus autour des concepts de Feng-Shui. Bien naturellement, ce financement important n’a pas été chose aisée, mais j’ai ne regrette nullement de l’avoir fait. Malgré mes études universitaires, j’ai dû retourner partiellement à l’école pour pouvoir obtenir toutes les autorisations. Diplômes en poche, il a ensuite fallu s’attaquer au recrutement du staff et suivre les formations réalisées par des grands spécialistes dans leur domaine. Le lancement du Spa a eu lieu le 19 octobre 2005. Quel parcours de combattant, quand j’y songe (rires) !
Quels sont vos principaux succès ? Et à quoi sont-ils dus ?
La reconnaissance à l’échelle internationale avec des récompenses est bien naturellement une grande satisfaction, mais également la confirmation que mes choix dans les prestations ont été à la hauteur des attentes de nos clients, fidèles, qui nous suivent depuis le début. Des hommes comme des femmes actifs, qui permettent l’évolution du Spa. Ce succès, je le dois également au fait d’avoir bien su m’entourer de professionnelles compétentes, prêtes à se remettre en question et à suivre des formations. Ma présence dans des forums et des associations Spa à l’international m’ont permis de développer un concept très pointu, et ainsi d’agrandir notre offre avec des spécialistes qui viennent plusieurs fois par année nous faire l’honneur de leur visite, avec des traitements exceptionnels. Un Américain de Honolulu, une Japonaise de Hongkong, mais également deux Françaises vivant au Luxembourg, et la toute récente collaboration avec une Luxembourgeoise, spécialiste du sommeil. Des petits succès qui font que nous récoltons aujourd’hui une réussite mesurable, mais dont je sais qu’il faut rester prudent et conscient de devoir sans cesse faire mes preuves. Rien n’est acquis définitivement (sourire).
Quels sont vos challenges aujourd’hui ?
À l’heure actuelle, je souhaite davantage transmettre mes connaissances. Je prépare l’écriture d’un livre-guide, regroupant tous les astuces pour bien vivre dans un équilibre parfait entre corps-esprit et âme, allant de la toute petite enfance jusqu’à l’âge avancé. Des conseils qui permettent à soutenir la santé sans perturber l’intelligence naturelle du corps.
Lorsque l’on est cheffe d’entreprise, le fait d’être une femme est-il un frein ou un atout, selon vous ?
Ni l’un, ni l’autre. Quand j’œuvre dans l’intérêt de nos entreprises, je suis juste une femme décideur. Je prends des décisions relatives à l’intérêt du bien-être des structures et de ses collaboratrices/collaborateurs. Je ne suis pas traitée autrement qu’un chef d’entreprise et moi-même, je ne pense, jamais dans des termes « homme-femme », car dans les affaires nous sommes des égaux. Je suis consciente que les hommes aiment de montrer leur supériorité par moment, mais cela passe très vite une fois qu’ils découvrent que, face à eux, se trouve une femme droite dans ses bottes qui maiîrise le sujet de discussion. Quelque part cela me fait sourire…
Quelles sont les qualités essentielles pour être un bon chef d’entreprise ? Un bon manager ?
Tout dépend bien naturellement si l’on est à la tête d’un grand groupe avec des responsabilités de mener à bien les objectives, ou cheffe d’entreprise de sa propre structure avec le financement personnel impliqué. Il est néanmoins fondamental d’être capable de prendre des décisions assez rapides, mais bien réfléchies. Avoir une grande faculté de flexibilité et d’adaptation dans un monde qui bouge, mais également avoir cette force de rester positif en toutes circonstances. Savoir bien s’entourer de personnes compétentes et ensuite leur accorder votre confiance. Il faut impérativement avoir une vision et la tisser, comme un fils rouge, autour d’actions concrètes. Être disciplinée tout en restant souple. Un bon chef d’entreprise doit être à l’image de son entreprise, c’est bien lui la carte de visite de son activité.
Avez-vous des rituels ?
Comme je travaille beaucoup, j’ai introduit, sans me rendre compte, de nombreux petits rituels qui ponctuent mes journées. Cela débute par une bonne séance d’étirements, dès le matin, jusqu’à mon rituel favori du soir, avec les soins de ma peau, car finalement le sommeil est notre régénérateur cellulaire par excellence et le premier geste de beauté ! Dans mon travail, je suis moins de rituels, chaque jour est imprévisible et c’est très bien ainsi (sourire) ! J’aime cela. Les rituels me permettent de me centrer et de rester connectée avec l’essentiel, la vie
Avez-vous un modèle (ou plusieurs) ?
Des modèles nous avons toutes et tous. Pour moi, ce n’est pas seulement une réussite business, mais, bien au-delà, un état d’esprit mesurable dans la durée et avec une approche humanitaire. J’admire des personnes comme Bill Gates et son épouse. J’ai hérité de l’énergie, l’enthousiasme et du courage en affaires de mon père, mais, à présent, ce sont mes deux fils qui m’épatent le plus. Ils embrassent une carrière internationale et je ne peux que constater qu’ils ont tellement mieux appréhendé le fonctionnement de notre nouveau monde. Aujourd’hui, j’apprends beaucoup d’eux.
Quels conseils donneriez-vous aux femmes qui veulent se lancer également ?
J’accompagne plusieurs femmes qui viennent de démarrer leur business, et ceci dans des domaines très divers. Les femmes sont toujours venues se présenter à moi, d’une façon très naturelle, et j’adore de lire dans leurs yeux cette force et énergie avec ce désir profond de vouloir y aller !