Elles s’appellent Iris Apfel, Maye Musk, Linda Rodin, ou encore Carmen Dell’Orefice, et entendent bien bousculer les codes de la mode. Icônes ou nouvelles venues, ces mannequins enchaînent les couvertures de magazines, comptent jusqu’à plusieurs millions d’abonnés sur les réseaux sociaux, et foulent les podiums des plus grandes maisons de luxe. Leur point commun ? Elles ont toutes plus de 70 ans, et n’ont que faire des critiques et des qu’en dira-t-on.
En mai 2022, Kim Kardashian, Ciara, et Yumi Nu comptent parmi les mannequins choisies pour apparaître en couverture du très prisé 2022 Sports Illustrated Swimsuit Issue, tout comme Maye Musk. A 74 ans, la diététicienne canado-sud-africaine, mannequin depuis près de cinq décennies, fait l’unanimité en maillot de bain une-pièce, faisant un peu plus voler en éclats les injonctions et diktats qui dominent les secteurs de la mode et de la beauté depuis (trop) longtemps.
Des rôles modèles pour casser les codes
Si la femme d’affaires est connue pour être la mère d’un certain Elon, ce sont bel et bien sa plastique, son charisme, son dynamisme, et sa confiance en elle qui séduisent les magazines féminins et les marques de mode. La preuve avec les couvertures et éditoriaux que l’icône de mode a réalisés pour la seule année 2022 : Harper’s Bazaar Bulgaria, L’Officiel, Grazia UK, Vogue Arabia, ou encore V Magazine. Et c’est sans compter sur ses campagnes pour la marque CoverGirl. De quoi faire pâlir les mannequins de 20, 30, ou 40 ans qui tentent de percer, ou de se maintenir, dans un milieu encore très fermé.
Bousculer les codes, et mettre un terme à l’âgisme. Tels sont les objectifs de ces initiatives qui se multiplient à vitesse grand V depuis deux années. “Maye Musk incarne l’idée que le vieillissement ne doit pas vous empêcher de poursuivre vos rêves. Vous ne nous croyez pas ? Allez sur le lien dans la bio pour voir les normes de l’industrie se briser”, a expliqué Sports Illustrated Swimsuit sur Instagram pour légender sa couverture. Et Maye Musk d’ajouter : “Merci à Sports Illustrated de montrer que les femmes de tous âges doivent se sentir en confiance dans un maillot de bain. Les hommes le sont certainement. C’est quoi cette histoire ?”.
La septuagénaire est loin d’être la seule à œuvrer pour faire évoluer les mentalités, que ce soit dans la mode, ou plus largement dans la société. Iris Apfel, qui a soufflé sa centième bougie en 2021, contribue elle aussi amplement à montrer que l’âge n’est pas synonyme d’apathie, de passivité, ou de laisser-aller, et encore moins d’invisibilité. Suivie par quelque 2,5 millions d’abonnés sur Instagram, Iris Apfel exhibe aujourd’hui avec fierté son dynamisme, tout comme ses rides, dans des campagnes aussi diverses que variées. Ciate, H&M, et Hugo Boss comptent parmi les marques avec lesquelles la centenaire s’est associée en 2022.
C’est une véritable vague argentée qui déferle actuellement sur la mode, avec des mannequins iconiques qui se font arrêter en pleine Fashion Week pour poser pour des streetstyles ou signer des autographes. Carmen Dell’Orefice, Beverly Johnson, Nicole Jordi, Linda Rodin, et bien évidemment Lauren Hutton, légende de la mode, apparaissent comme les nouvelles idoles de la planète mode – et des jeunes.
Une mode sans âge
Le phénomène ne se limite pas aux couvertures de magazines ou aux campagnes de mode. Sur les podiums aussi, ces mannequins révolutionnent certains standards. On l’a vu lors des derniers défilés de la semaine de la mode à Paris avec Charlotte Rampling et Marie Sophie Wilson sur le podium d’AMI Paris, laquelle a également défilé pour Marine Serre. Il faut toutefois préciser que les mannequins âgés de 50 ans et plus demeurent largement minoritaires sur les podiums, entre 0,52% et 0,78% de l’ensemble des castings d’après un rapport publié par The Fashion Spot. Une proportion très faible, mais qui contribue à changer le regard sur les femmes du même âge, qu’il s’agisse de mode, de beauté, de travail, ou tout autre domaine d’activité.
Bien sûr, ces changements n’en sont qu’à leurs prémices, mais nul doute que 2023 sonnera la fin, sinon le début de la fin, de l’invisibilité de ces femmes aussi dynamiques que belles, charismatiques, et plus que jamais volontaires de se faire une place dans ce système. Et il ne s’agit pas uniquement de prendre la pose devant des photographes ou de défiler devant des fashionistas avertis, mais d’entreprendre pour faire avancer le mouvement. Caroline Ida Ours, jeune mannequin de 62 ans et auto-entrepreneure, dont la seconde vie a justement démarré à l’approche de la soixantaine, l’a déjà démontré, tout comme la mannequin brésilienne Helena Schargel, âgée de plus de 80 ans, qui prend la pose en lingerie pour les créations qu’elle dessine elle-même avec une seule et unique requête : ne jamais être retouchée. Au regard de la multiplication des agences de mannequins pour plus de 50 ans, nul doute que cette révolution ne fait que commencer.